Pour parer à un krach bancaire, le Vanuatu a retrouvé ses monnaies anciennes

Lorsque l’on est un tout petit pays du Pacifique comme le Vanuatu, un archipel aux îles fragiles, la hantise d’un krach bancaire mondial est bien présente. On préfère alors ne pas attendre que Lehman Brothers, Merill Lynch et consorts plongent et entraînent avec eux la planète pour prendre les devants et inventer d’autres manière de se développer que celles venues de l’Occident.

Le Vanuatu, c’est là que se trouve Santo, cette grande île qui a été le théâtre en 2006 d’une vaste opération de recherche sur la biodiversité.


Cet archipel qui compte 80 îles — et qui était autrefois une colonie franco-britannique sous le nom de Nouvelles-Hébrides, jusqu’à son indépendance en 1980 — n’est pas seulement une des réserves de biosphère la plus riche du monde, c’est aussi un pays, petit et pauvre certes, mais très innovant.

Après la crise de 1998 qui a fortement touché l’Asie et le Pacifique, certains responsables culturels et politiques ont cherché comment se prémunir de nouvelles tourmentes dont ils savaient qu’elles étaient imminentes. D’autant qu'une vingtaine d’années de tentative de « développement » selon les normes occidentales, ont surtout aboutit à la croissance du chômage et de la délinquance, à l'expansion des bidonvilles dans la capitale, Port-Vila.

Alors, bien avant les tempêtes financières de cette rentrée, le gouvernement a mis en place un projet économique tout à fait original. En partant de l’idée qu’il fallait trouver une harmonie entre les valeurs traditionnelles, les systèmes d’échanges qui fondent la société et l’économie occidentale.

Banques pour monnaies d’échange traditionnelles
© Vanuatu National Cultural Council

L’impulsion est venue de Ralph Regenvanu. Ralph a été le premier anthropologue du Vanuatu. Egalement peintre et ancien directeur du Vanuatu Cultural Center, il est maintenant, à 37 ans, élu indépendant à l’Assemblée, avec le désir de lutter contre la corruption, de participer à la protection du patrimoine culturel de son pays et de manière générale des petits états insulaires.
Il a convaincu son gouvernement qui a décidé d’engager une totale révolution à différents niveaux.

Un des aspects forts de cette réinvention de l'identité, dans ce pays ou les échanges sont un fondement de la vie sociale et rituelle, c'est le retour aux "monnaies" traditionnelles — les anciens objets d’échange —, en coquillage, en cochon ou en nattes. Des objets chargés d’une grande valeur, garants de relations harmonieuses.

Ces monnaies coexistent maintenant à côté de la monnaie papier destinée aux biens de type occidentaux, comme un camion, ou l’hôpital. Elles servent à payer tout ce qui est « coutumier » et ont permis de relancer les anciens centres de fabrication (pour celles qui sont composées de coquillage très travaillés). On peut même payer sa carte d'adhésion à la bibliothèque publique de Port-Vila avec une natte — les fines vanneries de pandanus, colorées ou naturelles sont créées par les femmes, principalement sur l'île de Pentecôte.



La transmission de connaissances traditionnelles et coutumières est également intégrée dans les programmes scolaires. D'un point de vue très pragmatique, des moteurs de voiture qui fonctionnent avec du coprah issu de la noix de coco remplacent de plus en plus les moteurs à essence.
Soutenu par l’Unesco, cet ambitieux projet a donné lieu à un plan stratégique de développement « Vanuatu National Self Reliance Strategy 2020 ».
On peut en découvrir certaines facettes sur le site du Centre culturel du Vanuatu, (à la rubrique « traditional ressource management » ). Il a déjà donné de l'espoir à d'autres pays du pacifique, la promesse que d'autres voies sont possibles.